Pour les propriétaires d’entreprises constituées en société au Québec, il existe plusieurs façons de se rémunérer : salaire, dividendes ou les deux. Bien que ce choix puisse sembler simple, il peut, en tant qu’entrepreneur, avoir une incidence importante sur vos finances personnelles, les obligations fiscales de votre entreprise et vos plans de retraite.

Dans cet article, je présente les avantages et les inconvénients de chaque option, y compris les stratégies qui peuvent vous aider à réduire votre charge fiscale et à vous constituer un patrimoine à long terme.

N’oubliez pas que la stratégie de rémunération optimale dépend de nombreuses variables – la rentabilité de votre entreprise, vos objectifs financiers personnels, votre planification de la retraite et le stade auquel se trouve votre entreprise dans son cycle de vie. C’est pourquoi il est essentiel de consulter un fiscaliste qualifié et votre équipe de gestion de patrimoine avant de prendre une décision.

Salaire ou dividendes : Comprendre les principes de base

Avant de parler de stratégie, examinons tout d’abord le fonctionnement des salaires et des dividendes.

Le salaire

Un salaire est une rémunération régulière (y compris les primes) versée à un employé, en l’occurrence vous-même, pour des services rendus.

Le salaire est soumis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Au moyen de retenues salariales, vous contribuez également au Régime de rentes du Québec (RRQ), à l’assurance-emploi (AE) et au Régime québécois d’assurance parentale (RQAP). Cela permet également de générer des droits de cotisation à un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) et de bénéficier de certains crédits d’impôt et déductions fiscales, comme les frais de garde d’enfants.

Le fait de se verser un salaire aide à votre crédibilité financière auprès des prêteurs grâce à un revenu prévisible.

Retenues à la source payées sur les salaires

Pour le particulier Pour l’entreprise
  • Assurance-emploi
  • Régie des rentes du Québec
  • Régime québécois d’assurance parentale (RQAP)
  • Impôts fédéral et provincial
  • Portions de l’AE, de la RRQ et du RQAP payées par l’employeur

Les dividendes

Les dividendes sont des distributions aux actionnaires des bénéfices après impôt d’une société. Bien qu’ils soient soumis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques, ils donnent droit à un crédit d’impôt sur les dividendes, ce qui réduit le taux d’imposition effectif. Les dividendes ne font généralement pas l’objet de retenues à la source. Dans certains cas, votre société peut être amenée à payer une petite cotisation au Fonds des services de santé (FSS) sur ces dividendes.

Retenues à la source payées sur les dividendes

Pour le particulier For the business
  • Fonds de service de santé (FSS)
  • Impôt sur le revenu des personnes physiques (payé lors de la déclaration)
  • Généralement aucune, le FSS peut s’appliquer dans certains cas

Considérations relatives à la planification fiscale

Afin de mieux choisir son mode de rémunération, il est important de comprendre comment vous et votre entreprise êtes imposés et quels sont les impacts fiscaux pour chacun.

Comment le fait de se payer un salaire affecte-t-il l’impôt?

Les salaires sont imposés aux taux progressifs de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Par exemple, en 2025, les revenus supérieurs à 126 000 $ sont imposés à 25,75 % au Québec, tandis que l’ARC applique des taux de 20,5 % à 26 % sur les revenus supérieurs à 57 375 $. Cela dit, les revenus du travail créent des droits de cotisation à un REER, ce qui permet d’épargner en vue de la retraite avec report d’impôt et de bénéficier de certains crédits d’impôt et déductions fiscales.

Du point de vue des entreprises, les salaires sont considérés comme des dépenses professionnelles déductibles, ce qui réduit le revenu imposable. De plus, si votre entreprise atteint certains seuils de masse salariale – comme l’exigence des 5 500 heures – elle peut être admissible à la déduction pour petites entreprises (DPE) du Québec, ce qui réduit le taux d’imposition global.

Comment les dividendes affectent-ils l’impôt?

Les dividendes ne sont pas déductibles pour la société, ce qui signifie qu’ils sont payés à partir des bénéfices après impôt. Par conséquent, la société paie l’impôt sur le revenu avant de distribuer les dividendes, qui ne réduisent pas l’impôt sur les sociétés.

Du côté des particuliers, les dividendes sont imposés, mais bénéficient du crédit d’impôt pour dividendes. Il en existe quatre types : les dividendes déterminés, les dividendes non déterminés (ou ordinaires), les dividendes en capital non imposable, et les dividendes en biens ou dividendes en action. La plupart des plans de rémunération se concentrent sur les deux premiers :

  • Les dividendes éligibles proviennent de revenus imposés à des taux d’imposition plus élevés pour les sociétés et donnent lieu à des taux d’imposition plus faibles pour les particuliers.
  • Les dividendes non éligibles proviennent de revenus bénéficiant de la DPE et sont imposés à un taux personnel plus élevé.

En résumé :

  • Dividendes déterminés = impôt sur les sociétés élevé, impôt sur les particuliers faible
  • Dividendes non déterminés = impôt sur les sociétés faible, impôt sur les particuliers plus élevé

Les dividendes conduisent souvent à un revenu après impôt plus élevé si les cotisations au REER ou la participation au RRQ ne sont pas des priorités.

Considérations opérationnelles

Au-delà de l’efficacité fiscale, il est important de connaître les implications opérationnelles de la rémunération par salaire ou par dividende.

Les salaires nécessitent la mise en place d’un système de paie et l’enregistrement auprès de Revenu Québec et de l’ARC, des versements réguliers de la paie, des feuillets T4 de fin d’année, de contributions employeur et des retenues à la source. Cela ajoute à la complexité administrative et aux coûts, en particulier si votre entreprise n’a pas de comptable.

En revanche, les dividendes sont plus simples à émettre d’un point de vue administratif, car ils ne nécessitent pas de retenues à la source majeures, de versements ou de périodes de paie régulières, bien qu’ils doivent toujours être déclarés au moyen de résolutions d’entreprise appropriées et enregistrés dans les documents fiscaux de l’actionnaire à l’aide de feuillets T5.

De plus, les dividendes offrent une certaine souplesse en matière de calendrier et de montants, ce qui vous permet d’aligner les distributions sur vos besoins financiers personnels et sur la rentabilité de votre entreprise. Cette souplesse peut faciliter la planification fiscale et la gestion des flux de trésorerie.

Dans l’ensemble, les salaires assurent la stabilité et l’accès aux avantages liés à l’emploi, tandis que les dividendes offrent une facilité administrative et une flexibilité en matière de flux de trésorerie.

Considérations relatives à la retraite

La façon dont vous vous rémunérez peut influencer considérablement votre préparation à la retraite et l’accumulation de votre patrimoine à long terme.

Droits de cotisation à un REER

Seul le revenu gagné, tel que le salaire, génère des droits de cotisation à un REER. Les dividendes ne contribuent pas à ces droits. Maximiser les cotisations à un REER vous permet de bénéficier d’un important report d’impôt et facilite la planification de votre retraite.

Droits au RRQ ou RPC

Par l’intermédiaire de retenues à la source payées sur votre salaire, vous cotisez au Régime des rentes du Québec (RRQ) ou au Régime de pensions du Canada (RPC). Ceci permet d’acquérir des droits à des prestations de retraite futures. À l’opposé, les dividendes ne cotisent pas, ce qui peut réduire le revenu de retraite futur.

Régimes de retraite individuels (RRI)

Les régimes de retraite individuels sont des régimes de retraite à prestations définies qui conviennent aux chefs d’entreprise de plus de 40 ans ayant des revenus élevés et réguliers. Ils permettent une épargne-retraite plus importante avec report d’impôt que les REER.

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Comment choisir entre un salaire, des dividendes, ou les deux ?

Choisir entre salaire et dividendes est une décision qui demande une analyse de votre situation personnelle et professionnelle et l’aide d’experts en planification fiscale. Lors de cette analyse, les éléments suivants sont à considérer:

  • Vos objectifs financiers personnels : Votre besoin de liquidités immédiates, d’épargne à long terme et d’optimisation fiscale doit guider la composition de votre rémunération. Les salaires permettent de cotiser à un REER et d’obtenir un revenu stable, tandis que les dividendes peuvent procurer un meilleur flux de trésorerie après impôt.
  • La rentabilité de votre entreprise : Si votre entreprise génère des bénéfices stables, le versement d’un salaire de base peut être intéressant. En revanche, si les bénéfices sont irréguliers, la flexibilité des dividendes sera peut-être la meilleure option.
  • L’admissibilité aux crédits d’impôt et aux déductions fiscales : Certains avantages fiscaux, comme les déductions pour frais de garde d’enfants ou les droits de cotisation à un REER, requièrent un revenu gagné. Un salaire peut rendre ces avantages accessibles, ce qui n’est pas le cas des dividendes.
  • Vos capacités administratives : Les salaires nécessitent la mise en place d’un système de paie, de retenues à la source et de déclarations périodiques, ce qui alourdit votre charge de travail. Les dividendes sont plus faciles à distribuer, mais nécessitent toujours une documentation et une comptabilité formelles.
  • L’accès à la déduction pour les petites entreprises : Pour bénéficier du taux d’imposition des petites entreprises au Québec, votre entreprise doit verser au moins 5 500 heures de salaire par an. Vous payer un salaire peut vous permettre d’atteindre ce seuil.
  • La garde d’enfants et les prestations sociales : Les revenus salariaux donnent accès à des programmes tels que le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP). Si ces programmes sont importants pour vous, l’option salaire peut être la meilleure pour vous.

Tableau comparatif : Salaire vs Dividendes

Critère Salaire Dividendes
Imposition personnelle Taux progressifs plus élevés, mais accès aux crédits et déductions liés à l’emploi Taux effectif plus faible grâce au crédit d’impôt sur les dividendes ; l’impôt est payé au moment de la déclaration.
Déductible pour la société Oui – réduit le revenu imposable de l’entreprise Non – payé sur les bénéfices après impôts
Cotisation au RRQ Oui – génère des droits à la retraite Non
Génère des droits REER Oui – augmente la capacité d’épargne-retraite Non
Accès à la DPE (5 500 heures) Oui – contribue à respecter le seuil Non
Retenues à la source Nécessite des retenues régulières et des remises Aucune retenue à la source ; l’impôt personnel est payé à la fin de l’année ; le FSS peut s’appliquer.
Simplicité administrative Complexe : paie, retenues, T4, RQ, AE, etc. Simple à émettre (T5 + résolution)
Souplesse de versement Fixe (souvent mensuel ou aux deux semaines) Très flexible
Accès aux prestations sociales (RQAP, etc.) Oui – revenu d’emploi requis Non
Optimisation fiscale à court terme Moins avantageux si REER ou RRQ non utilisés Potentiel de liquidité nette supérieure

Optez pour une approche hybride

De nombreux conseillers financiers recommandent de combiner salaire et dividendes afin d’équilibrer les avantages des deux. Par exemple, vous pourriez vous verser un salaire suffisant pour:

  • maximiser vos cotisations au REER
  • être admissible à la RRQ et aux programmes sociaux
  • atteindre le seuil de la DPE

… et prendre le reste sous forme de dividendes pour des raisons d’efficacité et de souplesse fiscales.

Cela dit, chaque situation est unique. Compte tenu de la complexité des lois fiscales et des circonstances individuelles, je vous invite à travailler avec un conseiller en gestion de patrimoine et des fiscalistes qui vous proposeront des stratégies personnalisées qui tiennent compte non seulement de vos objectifs financiers, mais aussi de votre patrimoine global, tout en respectant les règles fiscales québécoises et canadiennes.

Darren St-Georges Author

À propos de l’auteur

Conseiller principal chez Groupe St-Georges de Gestion de Capital Assante Ltée, Darren St-Georges possède plus de 15 années d’expérience en gestion de patrimoine à Montréal. Au fil des ans, il a aidé de nombreux clients, dont des dentistes, des professionnels de la santé et des propriétaires d’entreprise, à simplifier des questions financières complexes et à atteindre leurs objectifs financiers. Épaulé d’une équipe de conseillers en gestion de patrimoine aguerrie, Darren propose une approche personnalisée. Sa mission est d’utiliser son expérience et ses compétences pour apporter une tranquillité d’esprit financière à ses clients. Contactez Darren pour obtenir des conseils en gestion de patrimoine avisés.

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